Discours de Thierry Beaudet - Remise du rapport de la Convention Citoyenne sur la fin de vie au Président de la République

Précision de date
Lundi 3 avril 2023
Catégorie
Conventions citoyennes
Date de publication
Chapeau

Discours de Thierry Beaudet, président du CESE,
Remise du rapport de la Convention Citoyenne sur la fin de vie au Président de la République

 

Seul le prononcé fait foi

Corps

Monsieur le président de la République, c’est en septembre dernier, à la suite d’un avis rendu par le Comité consultatif national d’éthique, que vous avez annoncé le lancement d’un débat consacré à la fin de vie.

Et c’est dans cette perspective que la première ministre a sollicité le conseil économique, social et environnemental aux fins de conduire des travaux visant à éclairer la question suivante : « Le cadre d’accompagnement de la fin de vie est-il adapté aux différentes situations rencontrées ou d’éventuels changements devraient-il être introduits ? » 

Nous avons donc formé une commission de travail pour intégrer pleinement le CESE aux réflexions et, par tirage au sort, nous avons constitué une convention citoyenne qui vient vous remettre aujourd’hui ses conclusions.

185 citoyennes et citoyens sur la ligne de départ début décembre et, 9 week-ends de 3 jours plus tard, 184 sur la ligne de l’arrivée, la citoyenne manquante, sans emploi au moment du tirage au sort, en ayant trouvé un.

Monsieur le Président, de ces quatre derniers mois, je retiens :

  • le formidable engagement des citoyennes et des citoyens, 
  • leur parcours de compétences, les capacités parfois nouvelles à prendre la parole en public, à défendre des points de vue argumentés dans une discussion contradictoire ;
  • leur parcours de conviction également, la délibération pouvant amener à modifier ou nuancer l’appréhension, la vision d’un sujet tellement complexe parce que touchant à l’intime et à l’ultime.


De ces quatre derniers mois, je retiens qu’il est possible dans notre pays de débattre au fond, dans le respect mutuel, de sujets qui divisent. 

Il est possible de dégager, de façon apaisée, une position claire, respectueuse des opinions divergentes, une position claire à même de donner des points d’appui et de l’assise aux décisions publiques. Deux conventionnels tirés au sort vous la présenteront.

« Si tu diffères de moi, loin de me léser, tu m’enrichis » écrivait Saint Exupéry. L’esprit de concorde, dans le respect des différences, a soufflé sur cette convention. 

Monsieur le Président, à votre initiative, une loi organique de 2021 a réformé le CESE pour en faire le lieu de la participation citoyenne. La culture du dialogue et de la convergence propre à notre assemblée s’y prêtait et c’est aujourd’hui une réalité. 

Avec la convention sur la fin de vie, nous avons franchi un cap. Ce sont les nombreux observateurs, français et étrangers, qui le disent. 

Nous ne sommes plus dans l’expérimentation, nous sommes en capacité de répliquer ce dispositif et je suis convaincu qu’il faut le répliquer.

Il faut faire vivre le désir de démocratie, regagner l’adhésion et la confiance entre chaque élection, rapprocher les citoyens des décisions qui les concernent. Et constituer une convention, comme vous l’avez imaginé et souhaité, est en soi un formidable acte de confiance. 

La participation citoyenne renforce la démocratie représentative. Loin de la contester ou de la concurrencer comme on l’entend parfois, elle la conforte.

La participation est constitutive d’un nouveau chaînage démocratique, d’une nouvelle manière de faire dans laquelle les citoyennes et citoyens ne se substituent pas à la décision des pouvoirs exécutif ou législatif mais apportent leur contribution, expriment leur avis.

Constituer une convention, Monsieur le Président, est un acte de confiance à la condition naturellement d’apporter des réponses aux aspirations exprimées. 

Ce moment est un moment de transmission. D’une certaine manière, c’est la fin de l’acte 1. Et c’est à vous, à la représentation nationale, qu’il appartient désormais d’écrire l’acte 2, puis quand le temps sera venu de revenir vers les citoyennes et citoyens participant, vers le CESE, pour dire les suites que vous aurez donné aux travaux.

Ce faisant, vous Monsieur le Président, et nous toutes et tous avec vous, aurons peut-être ouvert une voie nouvelle.

Face aux grands défis que nous avons à relever, ce n’est pas seulement la France mais toutes les grandes démocraties qui sont en tension, car l’époque demande de prendre des décisions exigeantes, parfois même difficiles, mais acceptées parce que partagées.

Ce partage n’est ni garanti, ni donné d’avance. Il est une patiente conquête.

L’assemblée que j’ai l’honneur de présider me rend optimiste. 

Des organisations aux intérêts divergents parviennent à s’y accorder, des citoyennes et des citoyens aux parcours différents parviennent à s’y écouter et à délibérer.

J’en conclus qu’une démocratie rythmée par des élections mais alimentée en continu par les citoyens c’est possible, qu’une culture de la délibération plus que de la confrontation c’est possible, qu’un nouveau continuum démocratique articulant démocratie délibérative et démocratie représentative c’est possible.

Non seulement c’est possible mais c’est de nature à faire émerger un nouveau modèle démocratique, un modèle français, plus moderne, plus vivant et plus inclusif.