Le sens de la peine : le CESE réouvre le dossier de la réinsertion des détenus

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La prison « désocialise, déresponsabilise, crée de multiples ruptures ou exacerbe celles qui existent déjà » écrivait le CESE dans son avis de 2019 " La réinsertion des personnes détenues :l’affaire de tous et toutes" rapporté par Antoine Dulin. Avant d’identifier les priorités pour lever les obstacles à la réinsertion, il jugeait nécessaire de réduire le niveau de la population carcérale et demandait un plus grand recours aux alternatives à la détention et aux aménagements de  peine. Trois ans après et constatant le peu d'évolution de la situation pénitencière en France, le CESE se saisit à nouveau du sujet en l'abordant avec une perspective différente. C’est la question du sens de la peine que le CESE placera au centre de sa réflexion. 

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Une situation carcérale ayant peu évolué

Trois ans après l'avis du CESE, et malgré les ambitions affichées des pouvoirs publics de renforcer la place donnée aux alternatives à la détention, et les deux lois (du 8 avril 2021 améliorant l’efficacité de la justice de proximité et celle du 22 décembre 2021 pour la confiance dans l’institution judiciaire), le constat reste peu favorable.

  • Le taux d’incarcération en France est l’un des plus élevés d’Europe avec 103,5 détenus pour 100 000 habitants, ses taux de récidive restent élevés. 
  • Les outils et modalités de peine, tels les Travaux d’intérêt général (TIG), le placement extérieur et la semi-liberté demeurent peu utilisés.
  • La densité carcérale dépasse de nouveaux records : 120% en moyenne dans les établissements
    pénitentiaire, plus de 140% dans les maisons d’arrêt.

Changement d'approche du CESE de ce sujet sensible

Sur le socle de son avis de 2019, le CESE a décidé de reprendre le sujet en l'abordant avec une perspective  différente. C’est la question du sens de la peine que le CESE placera au centre de sa réflexion.

En effet, différentes fonctions ou finalités (rétribution, dissuasion, prévention, réparation, amendement ..), parfois contradictoires, se superposent et il est difficile de saisir précisément ce qui doit donner un sens à la peine.

La justice est au croisement d’attentes diverses et contradictoires fonction des différentes parties prenantes.  Comment traiter ce sujet de société ? Quelles peines appliquer au regard des victimes, des condamnés, de la société en général ?

Le CESE a confié à la Commission des Affaires sociales et de la santé ce projet d'avis.

Elle dressera un bilan des évolutions survenues ces dernières années.

Elle s’interrogera sur les éléments qui expliquent la place toujours prépondérante de l’incarcération tout en étudiant des évolutions sur les conditions à réunir pour réduire le recours à la détention. En effet, des formes alternatives de résolution des conflits existent et ouvrent des perspectives. La justice « réparative » ou « restaurative » est inscrite dans le code de procédure pénale depuis la loi du 15 aout 2014 relative à l’individualisation des peines et renforçant l’efficacité des sanctions pénales. Elle met l’accent sur la réparation de la victime et sur l’adaptation de la réponse aux circonstances de l’infraction. Le texte traitera donc des différentes fonctions ou finalités de la peine : rétribution, dissuasion, prévention, réparation, amendement ... 

La justice doit-elle ou peut-elle agir sur son fonctionnement, ses procédures, son manque de moyens, les conditions de la détention …. ? Est-elle adaptée aux nouvelles délinquances, comme par exemple les atteintes à l’environnement ?

D'autres acteurs - comme la police ou les élues et élus- peuvent-ils être mobilisés ? Ce sujet questionne la société entière : en quoi l’opinion publique, l’attitude des médias contribuent-elles à faire de la détention la sanction la plus acceptée socialement ? 

Sur un tel sujet, les solutions ne se décrètent pas. La littérature scientifique montre tout l’enjeu d’une large acceptation sociale des évolutions : c’est en cela que l’apport du CESE, rassemblant la société civile organisée et les corps intermédiaires, est légitime.