Le CESE appelle à un changement d’échelle massif dans les reconversions professionnelles face aux crises sanitaire et climatique

Sous-titre
Avis « Les reconversions professionnelles »
Date
Publié le 23/03/2021
Chapô

Le Conseil économique, social et environnemental (CESE) a adopté aujourd’hui son avis intitulé « Les reconversions professionnelles ».  

Description

Le contexte de crise sanitaire a ébranlé le monde du travail et a eu un impact important sur l’activité et l’emploi, en particulier dans les secteurs affectés par les mesures de confinement et de fermeture des activités. Ce retournement conjoncturel est venu s’ajouter, de manière plus globale, aux grandes transformations économique, sociale et écologique : l’impératif climatique, l’accélération des évolutions numériques et technologiques, la transition démographique, la transformation des activités de production sont autant de tendances qui emportent des conséquences structurelles sur l’emploi et les qualifications. 

 

Le terme de « reconversion professionnelle » recouvre aujourd’hui des situations et des enjeux très variés, qui préoccupent l’ensemble de la population active non-salariée et des personnes en recherche d’emploi, que ce soit les jeunes arrivant sur le marché du travail et que la formation initiale n’a pas positionnés sur un métier offrant suffisamment d’opportunités, ou les personnes en deuxième partie de carrière, dont les qualifications initiales ne sont plus reconnues. Selon le récent baromètre de la formation et de l’emploi de Centre Inffo, un actif sur 5 serait actuellement engagé dans un processus de reconversion professionnelle. 

 

Dans un contexte de crise sanitaire inédit, mais aussi face aux enjeux du dérèglement climatique, qui nécessitent tous deux des adaptations profondes pour les salariés et les entreprises, le CESE appelle à un changement d’échelle massif dans les politiques en matière de reconversions professionnelles.

 

Dans cet avis, le Conseil formule ainsi un ensemble d’orientations et de préconisations, dont certaines sont détaillées ci-dessous, autour de trois objectifs : 

 

  • Donner à chaque personne les moyens de mieux anticiper les enjeux d’une transition professionnelle 

Constatant les limites financières de « Mon compte formation » pour des reconversions lourdes, et en particulier pour les salariés dont la qualification est ancienne ou pour ceux dont l’emploi est précaire ou qui ont connu de longues périodes de chômage, le CESE considère que les efforts de financement devraient porter sur l’abondement des comptes formation des personnes dont les besoins de reconversion peuvent résulter es accords de PSE ou de ruptures conventionnelles collectives. Il préconise à ce titre que l’abondement du compte personnel de formation (CPF) des salariés n’ayant reçu aucune formation diplômante ou certifiante dans un cycle de 10 ans puisse se poursuivre au-delà de la 10è année. Selon le Conseil, le dispositif des "projets de transition professionnelle" devrait également être proposé à certaines catégories de demandeurs d’emploi n’ayant pas bénéficié de formation qualifiante dans les cinq dernières années.

 

Pour mieux sécuriser les transitions professionnelles, le CESE appelle par ailleurs à engager la réflexion sur les voies et moyens permettant d’assurer à chaque personne active, quel que soit son statut (salarié, indépendant, fonctionnaire, etc.) une continuité des droits en matière de protection sociale, de retraite et de formation et d’harmoniser en conséquence les différents dispositifs concernés.

 

Relevant les écueils du conseil en évolution professionnelle (CEP), le CESE préconise de changer d’échelle dans sa mise en œuvre, afin de rendre effectifs et pertinents les droits individuels à la formation, en déployant un plan massif qui associe l’ensemble des acteurs, à travers une campagne d’information et de communication. 

 

  • Faciliter les mobilités et les reconversions professionnelles

Le Conseil recommande d’ouvrir les possibilités de certification de compétences pour les actifs, en érigeant comme priorité de France Compétences le travail de décloisonnement des certifications professionnelles et en poursuivant l’actualisation du référencement de l’ensemble des qualifications dans le cadre européen des certifications.  

Le CESE appelle par ailleurs à créer les conditions d’un dialogue social effectif sur l’anticipation de l’évolution des métiers, en incitant les entreprises à la mise en place de GPEC/GEPP négociées, notamment en prévoyant un temps d’information et de consultation annuel du CSE sur les enjeux de GPEC/GEPP et une consultation sur leur mise en œuvre. 

 

Le CESE recommande aussi d’évaluer et d’ajuster le nouveau dispositif transition collective aux besoins des salariés et des entreprises les plus fragiles. Il préconise ainsi une évaluation qui intègre une mesure de la variété des profils de salariés volontaires, de la durée des temps de formation nécessaire et de la réussite des projets de transition professionnelle. A l’issue de celle-ci, il invite à pérenniser le dispositif en facilitant son accès pour les petites entreprises (via des accords de GPEC territoriale au niveau du bassin d’emploi ou de la branche, à défaut d’accord d’entreprise) et en instaurant un accompagnement spécifique des salariés des TPE-PME. Ces dispositions permettraient également aux salariés des entreprises en procédure de redressement judiciaire d'accéder au dispositif. 

 

  • Mettre en place un plan massif d’investissement dans les compétences

Face à l’accélération des besoins de transition, le CESE recommande la poursuite et l’actualisation du plan d’investissement dans les compétences (PIC). Selon le Conseil, celui-ci doit aujourd’hui être augmenté pour intégrer une nouvelle dimension de transition professionnelle et le PIC « transition professionnelle » devra prioritairement financer l’effort d’accompagnement des demandeurs d’emploi dont les besoins en termes de formation sont les plus lourds.

 

Le CESE souhaite également renforcer l’exercice de prospective des métiers et des qualifications, en particulier en confiant à France Stratégie une méta-analyse, co-construite avec l’ensemble des parties prenantes, sur l’ensemble des travaux d’observation et de prospective sur les trajectoires travail, emploi, formation et compétences liés aux principales transitions. 

 

Pour encourager les reconversions et créations d’emploi vers les métiers d’intérêt général, le CESE préconise enfin d’engager l’ensemble des collectivités à promouvoir, par la commande publique, la création de nouvelles filières et de nouveaux emplois répondant aux enjeux en intégrant dans l’ensemble des contrats de marchés publics des clauses et critères environnementaux, économiques et sociaux

 

 

Cet avis, rapporté par Florent Compain (Groupe environnement et nature) et Bernard Vivier (Groupe CFTC) pour la section du travail et de l'emploi, présidée par Alain Cordesse (Groupe des entreprises) a été présenté lors de l’assemblée plénière du Conseil économique, social et environnemental du 23 mars 2021. 

L’avis a été adopté en plénière.