REACh : le CESE souligne les effets positifs du règlement et plaide pour des renforcements et évolutions

Sous-titre
Séance plénière du 14 janvier 2020
Date
Publié le 14/01/2020
Description

Pharmacie, automobile, textile, peintures, cosmétiques, jouets, plasturgie, bâtiment, produits de nettoyage, agro-alimentaire… les substances chimiques interviennent directement ou indirectement dans une grande partie des produits de notre quotidien. La maîtrise du risque chimique lors de leur fabrication et utilisation constitue un enjeu majeur pour l’environnement et la santé publique. 

Entré en vigueur en 2007, le règlement européen REACh (« Registration, Evaluation, Authorization and Restriction of Chemicals ») vise à répondre à cette attente en tenant compte des conditions de compétitivité et l’innovation des entreprises dans l’Union européenne.

Un peu plus de 10 ans après son entrée en vigueur, l’objectif, les principes et modalités, la mise en œuvre de REACh répondent-ils aux attentes des multiples parties prenantes concernées (Etats, entreprises, consommateurs, associations, syndicats, scientifiques) ? Ce dispositif est-il suffisamment robuste, complet et adapté pour répondre aux enjeux sanitaires et environnementaux actuels ? Est-il adapté aux substances spécifiques que sont les perturbateurs endocriniens ou les nanomatériaux… ?

 

A l’issue d’un rappel des principes structurants et innovants de REACh, au premier rang desquels sa gouvernance et l’institution d’un renversement de la charge de la preuve, et après une analyse des effets positifs obtenus, l’avis du CESE dresse des pistes d’amélioration articulées autour de 6 axes :

  • Améliorer la qualité des dossiers d’enregistrement et leur mise à jour en tenant compte de l’évolution des connaissances scientifiques :

A ce jour, il apparaît que deux tiers des dossiers contrôlés ne contiennent pas suffisamment d’éléments pour évaluer la dangerosité des substances. Face aux lacunes de certains dossiers d’enregistrement pourtant jugés initialement acceptables par l’ECHA, en particulier les plus anciens, le CESE recommande de définir précisément à l'échelle européenne quels critères un dossier d'enregistrement doit impérativement remplir. Le Conseil appelle aussi à adapter le contrôle des dossiers à l'évolution des connaissances scientifiques, à renforcer la R&D et à définir un processus spécifique de contrôle pour les substances produites à moins de 1t/an nécessitant une évaluation complète. 

Par ailleurs, alors même que REACh vise à améliorer la compréhension des dangers des produits chimiques tout en évitant des essais inutiles sur les animaux, le CESE regrette que l'on continue parfois d'avoir recours à l'expérimentation animale et recommande ainsi d’accélérer la mise au point de méthodes alternatives. 

  • Améliorer la mise en œuvre de REACh dans l’ensemble de l’Union européenne en renforçant les contrôles assurés par les autorités européennes et nationales

Si REACh prévoit que chaque État membre est responsable du contrôle de REACh sur son territoire, le CESE constate que cette mesure est aujourd'hui d'application inégale entre les États. Le Conseil constate aussi une insuffisance notoire de contrôle des produits importés. Il préconise donc de mieux garantir l’indépendance de l’agence européenne dédiée, l’ECHA, de renforcer ses moyens et le processus de coordination des actions de contrôle des États, d’aller vers un contrôle harmonisé entre les Etats membres et de mettre les moyens français au niveau des meilleures références européennes de contrôle. Le CESErecommande également de renforcer drastiquement le contrôle des produits importés, par le biais d’États généraux européens des douanes et la formation des agents.

  • Améliorer les liens entre REACh et les autres règlementations européennes

REACh est une règlementation fondée sur la distinction entre le danger et le risque. Le danger, intrinsèque aux caractéristiques de la substance, est fondé sur les connaissances scientifiques. Le risque, croisement du danger avec l’exposition, s’apprécie selon les étapes de transformation de la substance et ses usages et conduit à la mise en place de mesures de gestion. 

Plusieurs règlementations sectorielles (pesticides, additifs alimentaires, jouets, cosmétiques…) existent en parallèle de REACh pour la gestion des risques. Ainsi le CESE appelle à faire de REACh le référentiel pour l’évaluation des dangers des substances contenues dans les articles, indépendamment de leur usage. 

  • Améliorer la lisibilité de l’information délivrée sur le risque chimique et sa communication tout au long de la chaine de valeur, des salariés aux consommateurs

Pour les salariés, le CESE préconise de simplifier les fiches de données de sécurité et de faciliter leur circulation. Pour les consommateurs, il recommande d’informer sur la présence de substances extrêmement préoccupantes en l’intégrant dans les dispositifs d’affichage environnemental, une préconisation qui s’inscrit dans la lignée du précédent avis du CESE « L'affichage environnemental, levier pour la mise en œuvre de l'économie circulaire, » de mars 2019. Le CESE invite enfin à étudier les modalités d’inclusion de la conformité avec REACh dans le marquage « CE ».

  • Mettre en place la prise en compte par REACh des risques émergents

Le règlement REACh ayant été imaginé il y a maintenant plus de quinze ans, sa version initiale ne prenait pas en compte les risques liés aux nanomatériaux, perturbateurs endocriniens, les effets de multi-expositions aux substances et effets produits par combinaisons de substances. Le CESE préconise ainsi d’harmoniser la classification des CMR[1], et de mieux coordonner les agences nationales et européennes. Il appelle aussi à achever rapidement la redéfinition de la notion de nanomatériaux, de l’appliquer à l’ensemble des règlements européens et de finaliser les lignes directrices de l’OCDE relatives aux essais et les guides de l’ECHA correspondants.

Concernant les perturbateurs endocriniens, le Conseil rappelle la nécessité d’adopter au niveau européen une définition unique et harmonisée, de l’appliquer à l’ensemble des règlements européens dont REACh, et d’accélérer les travaux sur la définition de tests obligatoires, validés et pertinents d’évaluation.

Le CESE invite aussi à développer les recherches sur les effets des combinaisons de substances et les multi expositions. 

  • Garantir aux entreprises européennes un environnement de concurrence équitable

Pour prévenir d’éventuelles distorsions sur le marché européen, le CESEappelle à systématiser et harmoniser le recours aux analyses de meilleure gestion des risques avant toute orientation règlementaire. Il recommande aussi de soutenir activement le développement d’un standard analogue à REACh au niveau international, avec trois axes de travail : renforcer l’influence de l’UE et de la France auprès de l’OCDE pour multiplier les coopérations au-delà de l’UE et établir des lignes directrices communes, renégocier au niveau de l’UE les traités commerciaux existants afin d’y obtenir l’insertion de normes de protection analogues à REACh et enfin, prévoir systématiquement les mêmes clauses dans les futurs traités.

 

Cet avis, rapporté par Catherine Tissot-Colle (Groupe des Entreprises) pour la section de l’environnement, présidée par Anne-Marie Ducroux (Groupe environnement et nature), a été présenté lors de l’assemblée plénière du Conseil économique, social et environnemental du 14 janvier à 14h30.

L’avis a été adopté en plénière avec 146 voix pour, 0 voix contre et 2 abstentions.

 

Contact presse : 

Juliette Prost

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