Avis du CESE sur le projet de loi de programmation pour un nouveau modèle énergétique français

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Plénière du 9 juillet
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Le Conseil économique social et environnemental a été saisi par le Premier Ministre pour avis sur le projet de loi de programmation pour un nouveau modèle énergétique français. Cette saisine a été confiée aux rapporteurs Jean Jouzel, au nom de la section de l’environnement et Laurence Hézard, au nom de la section des activités économiques.

L'avis du CESE a été adopté en séance plénière : 169 voix pour, 0 contre, 14 abstentions

Le projet de loi de programmation pour un nouveau modèle énergétique français propose une impulsion pour une réelle transformation de notre modèle énergétique. Le CESE apprécie cette évolution destinée à soutenir le développement économique et social, la création d’emplois, la responsabilisation écologique ainsi que la compétitivité globale du pays.

Pour « Définir les objectifs communs pour réussir la transition énergétique, renforcer l’indépendance énergétique et lutter contre le réchauffement climatique », le CESE :

  • réaffirme avec force son adhésion à l’objectif d’une division par quatre (« facteur 4 ») des émissions de gaz à effet de serre à l’horizon 2050, ce qui exige un effort exceptionnel ;
  • appelle de ses voeux une politique européenne de l’énergie, cohérente avec la politique climatique. Il s’agit de construire une Europe de l’énergie forte et solidaire, capable d’atteindre ses objectifs en termes de diminution d’émissions de GES ;
  • souhaite que le droit d’accès à l’énergie, bien de première nécessité, soit réaffirmé comme un objectif de la politique énergétique nationale ;
  • suggère que le projet de loi rappelle l’objectif européen de 20 % d’économies d’énergie primaire d’ici à 2020 et intègre un objectif national d’efficacité énergétique à l’horizon 2030.

Pour « Mieux rénover les bâtiments pour économiser l’énergie, faire baisser les factures et créer des emplois », le CESE :

  • souhaite que les collectivités territoriales puissent être opérateurs du système de tiers-investissement ;
  • souhaite que la réforme des certificats d’énergie en simplifie le système, en assure une meilleure gouvernance pour plus de lisibilité et au final plus d’efficacité ;
  • regrette que le projet de loi n’aborde la question de la précarité énergétique qu’à travers le chèque énergie. Il s’interroge sur les moyens prévus et souligne la nécessité d’autres dispositifs ;
  • propose la création d’un livret de transition écologique dont les fonds, pour partie centralisés par la CDC, pour partie distribués par les banques, financeraient des projets fléchés transition écologique et énergétique. Leur affectation serait contrôlée.

Pour « Développer les transports propres pour améliorer la qualité de l’air et protéger la santé » , le CESE

  • regrette que l’accent soit mis essentiellement sur le développement des flottes de véhicules « propres ». Une stratégie de réduction de la consommation des énergies fossiles dans le secteur des transports ne saurait se limiter à promouvoir le tout-électrique ;
  • considère comme un contre-signal l’exclusion du dispositif des véhicules de moins de 3,5 tonnes fonctionnant au GPL, au GNV ou au bio-GNV. La loi devrait consolider l’effort de recherche et d’innovation pour les véhicules du futur, envisager le développement d’alternatives au transport routier et de l’inter-modalité, et accompagner les changements de comportements.

Pour « Lutter contre le gaspillage et promouvoir l’économie circulaire » :

Le CESE souligne que l’économie circulaire s’étend bien au-delà de la gestion des déchets. L’objectif de la transition vers ce type d’économie doit s’inscrire dans une démarche globale et de long terme. Elle nécessite une impulsion politique, un soutien des initiatives et un appareil productif adapté.

Pour « Favoriser les énergies renouvelables pour diversifier nos énergies et valoriser les ressources de nos territoires », le CESE :

  • demande une réelle lisibilité et transparence du fonctionnement de la CSPE, afin notamment d’assurer la péréquation nationale des tarifs. La création du Comité de gestion de la CSPE est une première étape ;
  • souhaite une évolution des dispositifs de soutien et de régulation des EnR qui favorise, en tenant compte des maturités technologiques, leur insertion dans une logique de marché. Les EnR doivent présenter un bilan satisfaisant en termes d’externalités et de création d’emplois ;
  • estime souhaitable, en fonction des projets, de permettre à un plus grand nombre de souscripteurs d’entrer au capital des sociétés coopératives, par exemple les habitants d’un territoire couvert par un plan climat ;
  • demande, avant toute décision concernant les concessions hydroélectriques, que toutes les options soient étudiées de manière contradictoire.

Pour « Renforcer la sûreté nucléaire et l’information des citoyens » :

  • l’objectif de transparence et d’exhaustivité doit être atteint pour tous les éléments - coûts, bénéfices et risques - et pour toutes les formes de production d’énergie ;
  • l’objectif de sûreté est un objectif majeur. Les mesures prévues en matière de pouvoirs de l’ASN et d’information du public y contribuent ;
  • les exploitants et les entreprises sous-traitantes doivent être soumis aux mêmes exigences en matière de qualité d’intervention, de radioprotection et de sécurité des salariés ;
  • le sujet du mix énergétique doit être abordé sereinement, sans dogmatisme et dans toutes ses dimensions afin de bâtir la meilleure complémentarité entre les différentes énergies.

Pour « Simplifier et clarifier les procédures pour gagner en efficacité et compétitivité », le CESE :

  • apprécie la désignation d’un garant dans les débats publics menés par la CNDP et demande la clarification de la notion de dérogation figurant dans l’article 36 du projet de loi ;
  • souhaite que les obligations environnementales encadrant jusqu’à présent les installations en mer et sur le littoral soient maintenues et la protection des espaces sensibles garantie.

Pour « Donner aux citoyens, aux territoires et à l’Etat le pouvoir d’agir ensemble », le CESE :

  • soutient l’adoption d’une programmation pluriannuelle de l’énergie. Une deuxième période de cinq ans « indicative » lui paraît pertinente en termes de marges de manoeuvre dans un contexte incertain ;
  • réaffirme que la transition énergétique requiert qu’un prix suffisamment incitatif soit donné au carbone ;
  • recommande que les consultations sur le suivi de la mise en oeuvre de la loi soient effectuées par les instances saisies sur le projet, qui pourront recourir à une expertise ponctuelle ;
  • recommande que la transition dans les territoires s’accompagne de synergies fortes entre les différents niveaux ; que la cohérence d’ensemble des actions conduites par les collectivités territoriales soit garantie par le niveau régional ;
  • souligne que dans les outre-mer les transferts de compétences doivent s’accompagner des moyens humains et financiers adaptés ;
  • la réflexion de fond nécessaire sur la CSPE ne doit pas remettre en cause l’objectif de solidarité nationale à l’égard des zones non interconnectées ;
  • souhaite voir réunies les conditions qui feront du nouveau modèle énergétique une source d’emplois nouveaux et un accélérateur de l’évolution des métiers dans tous les secteurs ;
  • recommande la mise en place d’un plan de programmation de l’emploi et des compétences ;
  • insiste sur la nécessaire démocratisation des enjeux énergétiques.

La transition nécessite un effort accru de recherche et d’innovation concernant les composantes du mix ambitionné, l’amélioration de l’existant et l’objectif d’économie circulaire. Une loi de programmation devrait contenir des engagements financiers en leur faveur. Pour le CESE, deux axes de recherche au moins doivent être privilégiés : le stockage de l’énergie et les réseaux intelligents.