Le CESE plaide pour un développement des alternatives à la prison et pour une meilleure réinsertion des personnes détenues

Sous-titre
Avis « La réinsertion des personnes détenues : l’affaire de tous et toutes ! »
Date
Publié le 26/11/2019
Description

Le système carcéral français est régulièrement pointé du doigt pour les conditions de vie en prison encore trop souvent déplorables voire attentatoires à la dignité. Dans un avis de 2006 sur « Les conditions de la réinsertion socio-professionnelle des détenus en France », le Conseil économique, social et environnemental (CESE) alertait déjà l’opinion sur les difficultés de réinsertion, la sortie de détention trop peu préparée. Plus de 12 ans après, les progrès ne sont toujours pas à la hauteur des enjeux.
Malgré des avancées, telles que la création du Contrôleur Général des Lieux de Privation de Liberté (CGLPL) en 2007, les atteintes aux droits fondamentaux lors de la période de détention ne régressent pas.
Saisi par le Premier ministre pour la première fois sur ces problématiques, le CESE estime que cette situation est notamment due à une culture sécuritaire qui ne cesse d’imposer de nouvelles contraintes. La détention est en effet envisagée presque exclusivement par le prisme de la sécurité, ce qui ne laisse guère de place à la réinsertion. Sur le plan budgétaire, la priorité a été donnée à de coûteux programmes immobiliers, sans effet sur la réduction de la surpopulation carcérale.
Sans mettre en question le principe de la sanction ou le rôle de la peine, cette situation doit interpeller les responsables publics. Durant la détention et à la sortie, le CESE pointe les ruptures dans les situations administratives, dans la prise en charge des soins, dans l’hébergement, ainsi que dans l’accès à l’insertion professionnelle et sociale que subissent les personnes détenues.


Dans l’avis adopté en séance plénière le 26 novembre, le CESE estime donc nécessaire de :

  • Développer les alternatives à la détention

Le CESE appelle en premier lieu à revoir fondamentalement la place de la prison dans le dispositif pénal français. Il préconise de fixer, pour enfin parvenir au respect du principe de l'encellulement individuel, un objectif pluriannuel de réduction de la population carcérale. En parallèle, le CESE estime nécessaire de développer les alternatives au « tout-détention ». Cela passe par la suppression des freins au développement de ces alternatives, en améliorant donc leur visibilité et leur financement. Pour le CESE, il faut sécuriser le financement de ces alternatives et informer régulièrement les juridictions des places disponibles. Les personnes concernées doivent être accompagnés en ce sens dès la phase d’instruction, en particulier par l’Agence Nationale du TIG et de l’insertion professionnelle.

  • Donner aux personnes détenues les moyens de leur réinsertion

Le CESE appelle à repenser en profondeur les politiques publiques visant à accompagner les personnes détenues dans leur parcours de réinsertion. Les problèmes de santé sont très prégnants en prison, avec une prévalence inquiétante des affections psychiatriques et des addictions. L’amélioration de l’accès aux soins et de leur continuité, pendant et après la détention, doit être une priorité. Il est essentiel d’assurer la continuité des soins et des liens familiaux, par exemple via la généralisation des parloirs familiaux dans les prisons. De même, le CESE estime nécessaires des progrès en termes de garantie des droits, notamment l'accès aux ressources et services indispensables à toute démarche de réinsertion. A l’heure du numérique, l’impossibilité d’accéder à internet en détention empêche d’accomplir les démarches et le CESE plaide pour la mise en place d’un système sécurisé d’accès aux sites indispensables à la réinsertion. Le CESE organise ses propositions autour de 8 priorités : le parcours de peine, la continuité de soins, l’effectivité des droits, la formation et le travail, les liens familiaux, la culture et le sport, l’accès à l’hébergement, les droits d’expression et le pouvoir d’agir.

  • Consacrer la réinsertion comme un objectif transversal

Le CESE pointe enfin un manquement dans la politique de réinsertion actuelle, encore majoritairement envisagée sous le prisme unique de l’administration pénitentiaire. Il faudrait davantage consacrer la réinsertion comme un objectif transversal, ce qui suppose de lui accorder plus de moyens, mais aussi d’organiser et d’évaluer régulièrement sa mise en œuvre par tous les acteurs concernés. Il est donc préconisé de mettre en place un comité interministériel afin de faire de la réinsertion des personnes sous main de justice un élément d’évaluation de toutes les politiques publiques par des indicateurs complets et concrets. Les moyens accordés aux politiques publiques de réinsertion devraient également être renforcés.

 

Le CESE, en associant des citoyens, souhaite contribuer à l’émergence d’un débat serein pour aboutir à un changement de pratiques, comme cela a pu avoir lieu en Europe du Nord.


Cet avis, rapporté par Antoine DULIN (Groupe des Organisations étudiantes et mouvements de jeunesse), a été élaboré par la Section des Affaires sociales et de la Santé, présidée par Aminata KONÉ (Groupe UNAF) et a été présenté lors de l’assemblée plénière du Conseil économique, social et environnemental du 26 novembre 2019.
L’avis a été adopté en plénière avec 150 voix pour, 1 voix contre et 2 abstentions.


Contact presse :
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