Déclaration du CESE contre le racisme et l'antisémitisme

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Vie de l'assemblée
Date de publication
Chapeau

 

Dimanche 28 avril 2019 | 65ème Journée nationale du souvenir des victimes et des héros de la déportation

 

La société civile par toutes ses composantes doit être au premier rang de la lutte contre le racisme et l’antisémitisme

Corps
 
Les actes de racisme et d’antisémitisme sont une atteinte aux valeurs de la république, aux libertés et à la cohésion sociale et générateurs d’injustices, de divisions, parfois même de barbaries.
 
Lutter contre la haine des juifs et contre toute forme de racisme est l’affaire de toutes et tous et de chacune et de chacun. 
 
Cet engagement est celui des organisations de la société civile, syndicats, associations, ONG…représentés au Conseil économique, social et environnemental, Assemblée consultative constitutionnelle de la République. 
 
Le CESE déplore et rejette les discours qui incitent, stigmatisent ou flattent les comportements racistes et xénophobes, a fortiori les actes de cette nature : refus de l’étranger, instrumentalisation des difficultés économiques et sociales pour prôner ces idées… Selon le bilan 2018 de la CNCDH : « La plupart des actes de racisme ne sont pas déclarés aux services de police. Les Roms restent particulièrement rejetés et la tolérance à leur endroit a très peu évolué depuis 2016. »
 
En 2018, selon la délégation interministérielle à la lutte contre le racisme, l’antisémitisme et la haine anti LGBT, les actes antisémites ont connu une hausse de 74 %. Le CESE s’en alarme et exprime son inquiétude profonde face à l’intensification d’un antisémitisme ouvert ou sournois, plus ou moins ancré et diffus dans la société française.
 
Ces questions sont aujourd’hui présentes dans tous les pays d’Europe.
 
L’antisémitisme en France est ancien et n’a jamais disparu. Il s’exprime aujourd’hui avec une nouvelle vigueur, parfois sous de nouvelles formes, souvent sur de nouveaux terrains, notamment par les réseaux sociaux.
 
Nous affirmons que la République est face à une situation d’urgence quand des faits racistes et antisémites se répètent, certains très graves, tels la torture et la mort de Ilan Halimi parce qu’il était forcément « riche,  puisque juif », le meurtre, par Mohammed Merah, de jeunes enfants et de leur père à l’école Ozar Hatol’rah à Toulouse ou les attentats déjoués d’une mouvance qui aspire à reproduire les attaques de l’hypercacher de Vincennes ou du Musée juif de Bruxelles, tous commis par des Français. Mais souvenons-nous qu’il n’y a pas de petit antisémitisme, d’antisémitisme sans gravité.
 
Les réactions de la société française ont sans doute été trop hésitantes, trop limitées. Nombre de nos compatriotes de confession juive se sont parfois sentis trop seuls, insuffisamment épaulés et soutenus par leurs concitoyennes et concitoyens face aux violences physiques les plus graves, comme le meurtre de Mireille Knoll, mais aussi face à toutes les violences du quotidien faites d’insultes, d’intimidations et d’exclusion. 
 
 
Alors que Simone Veil a fait son entrée au Panthéon, ceux qui prônent la haine antisémite redoublent d’acharnement pour s’en prendre à son image, à sa mémoire. Une raison supplémentaire pour rappeler que depuis 1791 date à laquelle les juives et les juifs deviennent des citoyens français égaux en droits, la lutte contre l’antisémitisme et la République sont inséparables.
 
Trois quarts de siècle après la fin de la Seconde Guerre mondiale et la libération des camps, après la rafle des enfants de la maison d’Izieu le 6 avril 1944, commanditée par Klaus Barbie, la France se souvient aussi que le combat républicain n’a pas toujours été en mesure de faire face aux groupes ayant activement collaboré avec le nazisme dont les héritiers cherchent aujourd’hui à se constituer une légitimité politique et à s’ancrer dans la jeunesse.
 
La lutte contre le négationnisme, diffusé ou relayé par des personnes se prévalant d’une position scientifique ou ayant accès à un public ou aux médias, doit être une priorité. 
 
Marceline Loridan-Ivens, amie de Simone Veil, rescapée comme elle d’Auschwitz et Bergen Belsen, a tout résumé en une phrase: « ils ne nous pardonneront jamais ce qu’ils nous ont fait ». Les témoins des camps sont en train de disparaître, le silence ne doit pas leur succéder. L’antisémitisme nazi, avant d’être une politique d’extermination en actes, a été une idéologie en mots. Les idées, les représentations, les grilles de lectures antisémites, sont toujours la toile de fond parfois invisible des passages à la violence, qu’il s’agisse des courants djihadistes comme de l’extrême droite traditionnelle. Chaque acte antisémite porte en lui la mort et nie les crimes d’hier pour mieux les répéter.
 
L’antisémitisme se fraye un chemin dans toutes les rancœurs, toutes les frustrations et toutes les confrontations. Ce sont des facteurs et des préjugés analogues qui produisent les multiples actes racistes dont les agressions récentes envers les Roms ne sont qu’un spectaculaire exemple. La vigilance civique et républicaine nous commande de prendre conscience de la situation actuelle, de mesurer sa gravité et de consacrer les ressources indispensables à ce que nous ne cédions jamais le moindre pouce de terrain à l’antisémitisme.
 
C’est pourquoi le CESE valorisera le concours national de la résistance et de la déportation et construira un partenariat « Mémoire et vigilance » avec la Fondation pour la mémoire de la Déportation, non seulement pour pérenniser cette mémoire, mais pour s’opposer à toute atteinte aux libertés.
 
Le CESE invite les organisations représentées en son sein et plus largement la société civile organisée à relayer cette déclaration qui sera également adressé à tous les CESER ainsi qu’au Comité économique et social européen. Il poursuivra sa démarche avec ses formations de travail, contre le racisme et l’antisémitisme, dans le cadre de ses missions de conseil du Parlement et du Gouvernement.
 
La lutte contre le racisme et l’antisémitisme relève de notre responsabilité de citoyennes et de citoyens et d’organisations de la société civile mobilisés pour assurer notre cohésion nationale.