Le CESE saisi par le Sénat sur la protection de l'enfance

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Le CESE a été saisi le 21 mars par le Président du Sénat sur le sujet de la protection de l'enfance afin d'évaluer la mise en œuvre concrètes des lois existantes. 

Faisant suite aux lois fondatrices du 14 mars 2016 et du 5 mars 2007, qui ont posé les objectifs de la politique de protection de l’enfance et fixé le cadre de sa déclinaison dans les territoires, la loi du 7 février 2022 fixait de nouvelles mesures pour améliorer la situation des enfants pris en charge par l’Aide sociale à l'enfance (ASE).

La mise en oeuvre de ces lois ont-elles été aussi concrètes que leurs objectifs étaient ambitieux ? Quels sont les facteurs qui contribuent au décalage entre les principes qu’elles énoncent et la réalité ? Quelles évolutions dans la situation des familles et des enfants impactent ces lois ? Quels sont les changements dans les métiers de la protection de l’enfance ? 

La Commission des Affaires sociales et de la santé présidée par Angeline Barth lance ses travaux sur ce sujet sensible. Elle inscrira ses préconisations dans une logique de parcours, en considérant toutes les missions qui relèvent de la protection de l’enfance. La Commission a nommé rapporteures de ce texte Mesdames Josiane Bigot (Groupe Familles) et Elisabeth Tomé-Gertheinrichs (Groupe Entreprises) qui présenteront l'avis en séance plénière à l'automne. 

Corps

Trois chiffres -en hausse- montrent l'urgence à protéger les enfants de notre pays


Près de 350 000 mineurs et jeunes majeurs sont concernés par l'aide sociale à l'enfance (ASE) 
150 000 enfants sont suivis par la protection judiciaire de la jeunesse chaque année
25 % des personnes sans domicile fixe sont des anciens enfants de l'ASE

Qu'est-ce que la protection de l'enfance ?

La protection de l'enfance vise à garantir la prise en compte des besoins fondamentaux de l'enfant, à soutenir son développement physique, affectif, intellectuel et social et à préserver sa santé, sa sécurité, sa moralité et son éducation, dans le respect de ses droits. Elle comprend des actions de prévention en faveur de l'enfant et de ses parents, l'organisation du repérage et du traitement des situations de danger ou de risque de danger pour l'enfant ainsi que les décisions administratives et judiciaires prises pour sa protection
(Code de l’Action Sociale et des Familles, article L 112-3)
Cette définition et ces trois lois ne suffisent cependant pas à définir les vastes champs d'action pour protéger les enfants. Les actions portent sur le cercle familial en premier lieu mais concernent aussi les secteurs de l'éducation, de la  prévention, de la justice, de la santé, du travail (salariés et employeurs sociaux), plus largement tout ce qui est relatif aux besoins fondamentaux de l'enfant.   

L'aide sociale à l'enfance se traduit en deux grandes actions :
- le placement en structures d'accueil
- le maintien à domicile avec la venue de travailleur sociaux sur site.

Plusieurs acteurs interviennent dans la protection de l'enfance :

- l'Etat : qui a un rôle de coordination de cette politique
--les services de la justice : le juge des enfants, la protection judiciaire de la jeunesse
- les départements : qui organisent les mesures de protection. La compétence a été décentralisée aux départements depuis 1983. Le département doit ainsi identifier et recueillir, traiter et évaluer les informations préoccupantes (IP) ou les signalements, relatives aux mineurs en danger ou qui risquent de l’être
- les acteurs sociaux (essentiellement associatifs) : qui accompagnent au quotidien les enfants (éducateurs, psychologues, travailleurs sociaux...).

Quel est le processus de protection de l'enfant ?

Le parcours de placement est souvent lent, long et chaotique.

Situation de danger pour l'enfant

- recueil d'une information préoccupante (IP), notamment via le 119
- décision d’assistance éducative ou de placement provisoire, prononcée par un Juge des enfants : l’enfant concerné est placé sous la responsabilité du Président du Conseil départemental. 

75 % des enfants confiés à l’ASE l’ont été sur décision judiciaire en 2021Prise en charge de l'enfant

Les services de l’Aide Sociale à l’Enfance (ASE) du département prennent le relais :

- ils identifient le type d'accompagnement le plus adapté aux besoins de l'enfant
- ils établissent avec la structure retenue les conditions dans lesquelles l’enfant sera accueilli
- ils nomment un référent ASE (qui est un professionnel en charge de l’accompagnement de l’enfant et de sa famille) pour suivre le projet individuel de chaque enfant et échanger avec les équipes du lieu d’accueil.

Seuls 27 départements sur 83 interrogés par le ministère de la santé en 2019
mettaient systématiquement en œuvre un projet pour l’enfant

Le CESE, acteur de la défense des enfants 

Le CESE est saisi par le Président du Sénat, Gérard Larcher, pour évaluer la réalité de ces lois sur le terrain : identifier les facteurs qui contribuent à aggraver ce décalage, les freins au déploiement, faire évoluer certaines des mesures suite à l'augmentation de la précarité des familles et des manques budgétaires des collectivités. 

Le CESE s’attachera ainsi à proposer une réponse globale et coordonnée sur les enjeux transversaux de ce sujet. L'avis sera présenté et soumis au vote à l'assemblée plénière du 8 octobre 2024, de façon à s’inscrire dans le calendrier de la commission d’enquête de l’Assemblée nationale sur les défaillances de l’Aide sociale à l’enfance.

 

Le CESE, avait en 2018 déjà travaillé sur ce sujet essentiel avec l'avis : Prévenir les ruptures dans les parcours en protection de l’enfance rapporté par Antoine Dulin. Le CESE déplorait le traitement réservé aux enfants et aux jeunes pris en charge par l'ASE et proposait des préconisations visant deux priorités :
- l’amélioration des parcours ;
- la consolidation de l’accompagnement dans la transition vers l’autonomie.
En savoir +

D'autres avis du CESE sont également en lien avec ce sujet transversal : 

Les métiers de la cohésion sociale rapporté par Evanne Jeanne Rose en 2022
" Un avis du CNPE datant de 2020 indiquait le besoin pour le secteur, d’engager des réflexions sur les normes et modalités d’encadrement des structures relevant de la protection de l’enfance."

- Les métiers en tension  rapporté par Pierre-Olivier Ruchenstain en 2022
"Pour certaines professions, deux des facteurs de perte d’attractivité (insuffisance  de reconnaissance matérielle ; conditions de travail contraignantes) se cumulent. C’est, par exemple, le cas aujourd’hui des personnels hospitaliers : infirmiers, sages-femmes, et également animateurs et animatrices enfance/jeunesse, éducateurs et éducatrices spécialisés, etc… "

- Le sens de la peine rapporté par Danièle Jourdain-Menninger et Alain Dru en 2023 
"La chaine pénale reproduit les inégalités et donne peu de chance à la réinsertion. 41% des détenus et 37% des détenues ont fait l’objet d’une mesure d’assistance éducative dans l’enfance selon une étude de la Fédération régionale de recherches en psychiatrie et santé mentale Hauts-de-France* 

 

 

 

* Auteurs de l'étude :Thomas Fovet, Camille Lancelevée, Marielle Wathellet, Oumaïma El Qaoubli, Pierre Thomas), La santé mentale en population carcérale sortante : une étude nationale, décembre 2022

 

 

 

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