Compte-rendu de la réunion de la délégation à l'Outre-mer du mardi 14 février 2012

Catégorie
Travaux et auditions
Date de publication
Sous-titre
La forêt ultramarine
Chapeau
  • Audition de M. Marc DEL GRANDE, Chef du service des politiques publiques à la Délégation générale à l’Outre-mer (DéGéOM), accompagné de M. PLAISIR et de M. MARTRENCHAR
  • Audition de M. Claude RUPÉ, coordinateur Corse-DOM à l’Office national des forêts (ONF)
Corps

Au cours de son audition, M. DEL GRANDE a d’abord rappelé l’importance de la forêt européenne dans le monde et la place prééminente de la forêt française au sein de l’Union européenne. Il a ensuite souligné que la forêt française ultramarine était confrontée à des enjeux écologiques, mais aussi sociaux et économiques. Puis il a articulé son intervention en trois points : le statut juridique de la forêt ultramarine, son potentiel en terme de développement durable et enfin les menaces qu’elle doit affronter.

Au sein de la forêt ultramarine, le statut public et le statut privé se côtoie avec un avantage, au niveau global, pour le statut public même si des différences existent selon les territoires. Ainsi, l’Office National des Forêts gère près de 5,7 millions d’hectares de forêts publiques dans les départements d’Outre-mer. A la différence de  la forêt publique, la forêt privée n’est pas suffisamment bien connue et des inventaires sont en cours dans certains territoires ultramarins.

Dans les Outre-mer, la forêt est bien souvent une composante essentielle du paysage. Elle présente un potentiel important lié à la biodiversité qu’elle abrite : 1 hectare de forêt guyanaise regroupe par exemple 140 à 150 essences différentes d’arbres contre 10 en métropole. Elle est également un véritable lieu de recherche et comprend un nombre important de laboratoires. Elle présente également un  potentiel économique lié à la production de bois et à sa transformation. Toutefois, il n’y a pas de véritable tradition forestière dans les Outre-mer et la ressource est parfois difficile d’accès. Le nombre d’exploitants baisse et certains maillons de la chaîne d’exploitation et de première transformation sont en difficulté dans un marché régional très concurrentiel. La forêt ultramarine recèle aussi un grand potentiel énergétique lié à la biomasse. Des projets de centrales sont à l’étude en Guyane, à La Réunion et en Guadeloupe. Enfin les enjeux liés au bilan carbone doivent également être pris en compte.

La forêt ultramarine fait face à de multiples menaces : les espèces envahissantes, le défrichement, la culture sur brûlis, l’étalement urbain, l’orpaillage clandestin en Guyane, etc. Pour lutter contre ces menaces, des réponses adaptées ont été mises en œuvre : opération Harpie en Guyane,  projets pour lutter contre les espèces envahissantes retenus dans le cadre d’un appel à projets de la Stratégie Nationale de la Biodiversité, promotion de la certification et de l’agroforesterie, reboisement des zones érodées, etc.

A l’issue de cette présentation, messieurs DEL GRANDE, PLAISIR et MARTRENCHAR ont débattu avec les conseillers. Des conseillers se sont interrogés sur les obligations de reboisement dans les territoires ultramarins en cas de défrichement, sur l’existence de Natura 2000 et de la Trame-bleu-et-verte dans ces territoires et le rôle de la forêt tropicale dans le bilan carbone. Les mesures nécessaires pour stimuler le secteur de la première transformation du bois ainsi que les moyens consacrés à la lutte contre l’orpaillage illégal (recours à l’imagerie satellitaire par exemple) ont été discutés. L’absence de législation sur le prélèvement des plantes, notamment dans la forêt tropicale, a été déplorée. La pression que va exercer sur la forêt le doublement de la population guyanaise a été soulignée ainsi que les effets de l’aménagement de ce territoire (construction de routes, etc.). Enfin, des conseillers ont insisté sur la nécessité de valoriser davantage d’essences d’arbres pour améliorer la rentabilité de la filière-bois, de promouvoir la certification, de favoriser la biomasse et d’accorder également de l’attention aux forêts moins étendues comme celles de Saint-Pierre-et-Miquelon ou de Wallis-et-Futuna.

Au cours de son audition, M. RUPE a rappelé que l’Office National des Forêts n’intervenait que dans les départements d’Outre-mer et devait s’implanter à Mayotte en 2012. L’office gère actuellement près de 5,7 millions d’hectares de forêt ultramarine, le parc national de Guyane étant géré par un établissement ad hoc. La forêt occupe presque la totalité du territoire guyanais. Dans les autres territoires ultramarins, la forêt est moins étendue qu’en Guyane mais elle occupe quand même une part importante de ces territoires. M. RUPE a ensuite détaillé les différents statuts publics de la forêt ultramarine. Il a insisté sur la biodiversité exceptionnelle abritée par cette forêt (nombreuses espèces endémiques, variétés des essences d’arbres, etc.) et la responsabilité particulière de la France au niveau mondial pour la préserver et la protéger en particulier contre les espèces envahissantes. Il a également insisté sur les enjeux liés à la préservation du foncier notamment sur le littoral et la lutte contre les occupations illégales. Il a souligné l’importance de la fonction sociale de la forêt. Cette dernière peut notamment revêtir deux aspects : l’accueil du public (habitants et touristes) facilité par des aménagements indispensables (sentiers de randonnées, aire de repos, gites, etc.) ainsi que l’accueil de jeunes dans le cadre de chantiers d’insertion en collaboration avec les conseils généraux. Il a décrit les conséquences économiques, sociales et sanitaires de l’orpaillage clandestin en Guyane et les moyens mis en œuvre pour l’éradiquer. Il a noté, qu’à l’exception de la Guyane, le potentiel productif de la forêt ultramarine n’était guère élevé. Enfin il a constaté que les fonctions sociale et écologique de la forêt ultramarine n’étaient pas suffisamment rémunérées.

Au cours du débat, les conseillers se sont interrogés sur le budget de l’ONF, sur la tentation de privilégier la production au détriment de la préservation, sur les  moyens à mettre en œuvre pour mieux structurer la filière-bois dans les territoires ultramarins et soutenir les prix de vente du bois. Le recours à de nouvelles ressources de financement pour préserver la biodiversité par exemple a été discuté ainsi que la difficulté d’assurer la traçabilité de l’or pour lutter contre l’orpaillage clandestin. Enfin les avantages et inconvénients de la biomasse ont été soupesés. 

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