Discours de Thierry Beaudet - Conférence des Enjeux, mardi 12 octobre 2021

Précision de date
Le 12 octobre 2021
Catégorie
Président
Date de publication
Chapeau

Discours de Thierry Beaudet, Président du CESE
Ouverture de la Conférence des Enjeux
Mardi 12 octobre 2021

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Corps

Chères conseillères,

Chers conseillers,

Chers invité

Chers amis,

Je suis très heureux de votre présence pour cette journée qui marque la réalisation d’un engagement que j’avais pris, en même temps que l’aboutissement d’un travail collectif qui a commencé dès le mois de juin et se terminera dans quelques semaines, par l’adoption des orientations stratégiques de notre assemblée.

Mais au-delà des appellations, de quoi parlons-nous ?

La période électorale qui semble déjà ouverte montre chaque jour, une forme de myopie qui afflige la plupart de nos politiques publiques. Nos horizons et nos destins se dessinent à 2050, à 2100, mais notre démocratie peine à dépasser la scansion des mandats présidentiels et parlementaires de 5 ans, durée elle-même rognée par l’approche des élections. Le débat public semble aller et venir au hasard des sondages, assimilés à des oracles, des sondages qui tiennent lieu de participation, d’écoute et de consultation citoyennes.

Cette préférence pour le présent, observée depuis longtemps dans les démocraties, devient même, à la faveur des nouvelles technologies, des chaines d’information en continu et des réseaux sociaux, une préférence pour l’immédiat.

Si la réactivité peut être une vertu dans l’action, elle est rarement bonne conseillère dans la réflexion. Gouverner notre démocratie requiert l’art de combiner le temps court de la responsabilité et le temps long de la conviction.

Notre pays a besoin d’une assemblée du temps long, une assemblée qui se projette dans le futur et dans l’action. Parce que les horizons à 30 ans ne doivent pas reculer devant nos pas, ils exigent d’agir aujourd’hui. Le CESE doit incarner cette tension, en tant qu’assemblée de la société agissante. Ce n’est pas un exercice de divination, c’est un temps nécessaire que l’on se donne en début de mandat pour se donner de la profondeur de vue. C’est pour cela que j’ai voulu cette journée : entendre les grands défis identifiés depuis les organisations représentées au CESE et les confronter à nos travaux présents et à venir.

Le résultat de ces échanges contribuera à définir nos orientations stratégiques du CESE pour les 5 prochaines années. Ce ne sont pas nécessairement des thématiques de campagne, mais des sujets de fond ; non pas les enjeux qui font la Une, mais ceux qui font l’avenir. Au CESE, le seul agenda qui compte, ce n’est pas l’agenda électoral, mais c’est celui du pays. Et nous sommes là pour faire qu’il s’écrive.

Avant de lancer notre nouvelle assemblée dans la production de nouveaux avis, il était nécessaire, plus que jamais, de se mettre d’accord sur des orientations. Plus que jamais, effectivement, car notre institution a été transformée par la loi organique de janvier dernier. De nouvelles missions, de nouvelles prérogatives lui ont été conférées, pour en faire, en plus du forum de la société civile, le carrefour de la participation du public. Ce sont des sujets dont nous nous saisirons, mais de plus en plus, espérons-le, des sujets dont nous serons saisis. Il importe donc d’y voir clair et d’énoncer des priorités, pour que l’ensemble de nos travaux fasse sens, pour éviter aussi bien de faire des impasses que d’être instrumentalisés.

Commencer par une vision commune, plus que jamais, parce que nous vivons un tournant dans notre histoire, avec des défis démocratique, sociaux et écologiques sans précédents. L’abstention, la perte des liens, l’explosion des inégalités, le dérèglement climatique, l’épuisement de la nature, les rivalités internationales, la fissuration de la construction européenne, la question de la transmission d’un monde viable aux nouvelles générations. Ces défis, toujours plus transversaux, nous obligent à être efficaces et utiles, avec des travaux ancrés dans le réel, reliés les uns aux autres, et portés sur la place publique par chacune et chacun des conseillères et conseillers.

Mieux, ces défis invitent les 82 organisations représentées au CESE à davantage endosser et relayer ces travaux, et je remercie les responsables présents aujourd’hui parmi nous.

Commencer par une vision commune, enfin, car nous devons aider à l’évolution de la prise de décisions publiques.  Depuis des décennies, la décision politique semble vouloir forcer l’alignement de la société sur des positions fondées sur un socle de légitimité de plus en plus étroit. Nos concitoyennes et concitoyens, nous l’avons vu maintes fois, sont  de plus en plus rétifs à cette logique verticale et descendante. L’acceptabilité ne concerne pas que les parcs d’éoliennes, mais toute décision non préparée, non assise sur les points d’appuis nécessaires au plus près de la société. La prise en compte en amont de la société civile, de celles et ceux qui sont à la fois sujets et acteurs des réformes, doit débloquer notre démocratie, la faire évoluer quand beaucoup de voix s’élèvent pour l’amoindrir ou douter de son efficacité. Notre responsabilité est éminente, car nous sommes non pas l’unique, mais le principal acteur institutionnel de la société civile.

Ce que nous devons incarner par cette Conférence des enjeux, c’est la capacité de la société civile à se prendre en main. En énonçant avec force et clarté nos priorités pour la France, nous pouvons inspirer, susciter l’intérêt des candidats à la magistrature suprême d’une part, de la nouvelle présidente ou du nouveau président élu.e d’autre part. Nous les solliciterons pour cela.

Il ne s’agit pas seulement d’accroître notre rôle de conseil et d’influence, il faut, comme nous l’avons maintes fois fait dans notre histoire, poser en amont les termes du débat et de la décision publics. Etre « l’assemblée du premier mot », certes, mais du mot juste, du mot partagé et qui porte, du mot qui oriente l’arbitrage public.

A ce stade de notre travail collectif, nous sommes parvenus à nommer les enjeux cruciaux, au nombre de trois grandes familles.

Les enjeux de résilience tout d’abord, car nous n’avancerons ni ne convaincrons sans garantir à chacune et chacun d’entre nous solidarité et sécurité. Pour prévenir les fractures, il s’agit de promouvoir la cohésion sociale et territoriale, pour une société plus accueillante et protectrice, axée sur le progrès social et l’éducation. Cette résilience doit ensuite nous permettre d’affronter les enjeux des nécessaires transitions et leur acceptabilité : écologiques à travers le défi climatique et la perte de biodiversité, économiques en réinventant notre modèle économique et notre appareil productif, sociales en questionnant la place du travail dans une société aspirant à une meilleure qualité de vie.

Enfin s’imposent à nous les grandes transformations à l’échelle du monde, qui nous emportent mais que nous devons maîtriser, fort de notre appartenance à l’Union européenne : d’une part révolutions technologiques, mutations de la mobilité, évolution des métiers, réseaux sociaux, mais également d’autre part crises migratoires, respect des libertés fondamentales, accords commerciaux, fiscalité commune et gestion des biens communs mondiaux.

Voilà de quoi faire ! Et je suis persuadé que les tables rondes prévues tout au long de la journée enrichiront notablement la réflexion. Je me réjouis de la diversité des participantes et participants à ces réflexions.

Nous avons voulu mêler conseillères et conseillers nouveaux, conseillères et conseillers de la précédente mandature, que je salue et que je remercie, responsables des organisations représentées, grands témoins… C’est une société civile approfondie et augmentée qui commence son travail à travers vous.

Je nous souhaite bon courage !

Je vous remercie.


Copyright Katrin Baumann

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